Jenny Johnson

"Ma maman me dit que je suis spéciale"... Nan j'déconne, elle est morte ahah ! Fait pas cette tête, on peut plus déconner. Par où commencer ? Je suis gentille. Avec ceux qui le méritent... Mais y'a pas grand monde. Les orphelins sont ce qui se rapproche le plus de cette idée, mais j'en suis venu à me demander si il ne valait pas mieux ne pas grandir. Je suis heureuse, mais je sais que ça ne convient pas à tout le monde, et sachant ce qu'on endure... J'ai enduré pas mal, personnellement. Ça à fait de moi ce que j'suis devenu, une sorte de chaos. Les repères c'est les parents qui doivent les donner, mais à l'aveugle, c'est bien plus simple. Au moins, j'ai le bénéfice non négligeable de ne pas vraiment avoir d'attache : Vivant depuis très longtemps seule, et bien qu'adorant discuter et faire la fête, je reste une paria. Heureusement que j'ai mon nouvel ami Motisma. On s'éclate vachement. Vous l'avez peut être compris, je suis assez lunatique aussi, je change assez facilement de caractère. C'est du à mon amour du théâtral peut être ? Pas sur, d'aussi loin que je me souviens, j'ai toujours été comme ça avant même de commencer. Ah, oui, j'aime bien l'action aussi : Si on ne fait rien, c'est triste, j'aime le mouvement. La couleur.

Et casser des trucs, aussi.

Tout comme mon esprit, je suis libre. Attaché à cette valeur, je ne porte que rarement de gros vêtements, préférant des tenues légères, le vent soufflant étant des plus vivifiant. Et puis, il faut pas déconner, je suis une dame maintenant ! Maquillage, tout ce qu'il faut. Il est important de prendre soin de sa posture et de sa stature, première leçon de l'art théâtral. Mes couleurs son multiples, mais j'aime particulièrement les vives : Le fuchsia, le bleu électrique, le violet... Des couleurs jeunes et dynamiques, motivées et sér... En tout cas, des couleurs cools. Le noir et blanc trouvent étrangement grâce à mes yeux, malgré leur négativité en terme de couleurs. A quoi bon s'attacher à quelque chose de toutes manières ? Il faut toujours embrasser toutes les facettes qui s'offrent à vous. Voilà justement ce qu'on pourrait se dire de moi, d'ailleurs : Une fille sans attache, et ça se voit au premier coup d'oeil. Bah, j'les emmerdes, c'est cool. Ah oui, sinon je suis sacrément sportive et filiforme. Ça aussi on dit que c'est pas cool pour une dame. Les gamines de mon age se croient mieux avec leurs formes généreuses sans doutes ? Pas comme si j'voulais être généreuse. Et puis comme je disais... Je les emmerde.

Ah et t'as vu j'ai les cheveux bleus !

Je me souviens pas de ma naissance. Normal quoi. Tout ce que j'sais, c'est qu’apparemment j'suis née ici, et que j'ai été à l'orphelinat très jeune. Je suis pas resté longtemps bien sur, trop de règles pour moi : Vers l'age de 10 ans, dès que j'ai pu, j'ai été vivre au plus près de mes racines, dans la rue. Pouilleuse direz vous peut-être. Oh je vous rassure, ça se fait assez facilement, le vol est monnaie courante ici, il faut juste éviter de s'accrocher à quoi que ce soit. Manger c'est pas toujours simple, mais les jours de marché sont par exemple bénis. Alors on récupère un max, on retour à sa planque. Moi, j'avais un petit recoin oublié entre des bâtiments divers, à côté d'un vieux théâtre délabré qu'avait pas servi depuis bien longtemps. Mais justement, un jour, vers mes 13 ans, l'activité était revenue. Une vieille dame avait racheté l'affaire branlante, et voulait en faire une école de théâtre. Pff, des trucs à la con en soit. Mais ils avaient l'air de s'amuser ceux qui rentraient là dedans. La musique aidant, et mon tempérament curieux prenant le dessus, j'ai commencé à m'infiltrer dedans en passant inaperçu, et je fut frappé : L'apparence taudis laissait en fait place à une scène lumineuse, et à des tentures des plus colorées. Une explosion lumineuse. Un choc. Et au milieu, ces gamins qui s'amusaient, jouant des rôles sous l’œil bienveillant de la vieille dame. C'était cool. Aussi je revins de plus en plus souvent, me cachant de moins en moins, comme souhaitant m'intégrer malgré moi à ce monde de lumières. Je finis par me faire remarquer, et l'on me proposa alors de m'avancer sur scène. De faire un essai. Ce fut génial. Musique, Mouvement, Lumière, Couleur... Tout tourbillonnait dans ma tête, et je ne pourrais jamais l'oublier. Puis ce fut la douche froide : Je ne pouvais essayer éternellement, et même si la gérant savait ma situation et avait fait son maximum pour m'aider... Les costumes. La lumière. Tout cela coûtait de l'argent, et bien peu de personne en avait en masse, dans cette foutue ville.

Mais je n'allais pas les laisser me priver de la seule chose à laquelle je m'étais attaché. De l'argent, j'en trouverais... C'est là que j'ai commencé à voler autre chose que de la bouffe. Ce fut facile, je connaissais beaucoup de monde à force, et surtout, je connaissais tout de la rue. C'était chez moi : Les ouvertures des étales, les passants, leurs habitudes... De l'argent, j'en grattais par ci par là, tantôt à la bourse des badauds, tantôt sur le derrière d'un commerce branlant. Tout le monde devait se débrouiller, et je ferais le nécessaire. Mais y'a pas très longtemps de ça... Quelque chose tourna mal. J'avais réussi à me faufiler dans la piaule d'un des types qui gérait les patrouilles. Pour le coup, en terme de pognon c'était le bon plan, j'm'étais fait un paquet. Et accessoirement, j'avais trouvé... Un ami. Motisma : Une petite créature électrique toute bizarre mais rigolote, qui était utilisée par ce salaud là pour entretenir la lumière sur son bureau. Pourquoi je l'avais pris ? Car il m'a joué un tour. Me faisant sursauter pendant ma rapine, afin de me complexifier la tâche. Une farce. On ne m'en avait jamais vraiment fait... Du coup, j'avais récupéré sa pokeball sur un bureau à côté, et je m'étais barré avec tout ça, tout content. Sauf que l'on m'avait vu : Une bonniche qui faisait le marché dans ma rue parfois, une pauvre femme... Le soucis, c'est que du coup, elle me connaissait aussi, venant traîner par chez moi. Résultat des courses, elle s'empressa de me balancer.

Je le su que le lendemain, ça... Lorsque, rentrant dans le théâtre à l'heure habituelle des cours, sans me soucier de l'absence inhabituelle de musique, je tombais nez à nez sur ce type chauve, le sourire mauvais, assis sur une simple chaise en bois au milieu d'une marre de sang, les cadavres de mes comparses élèves et de la vieille dame jonchant la scène. Mon cœur cessa de battre et je vis trouble un instant, tandis que j'entendis la voix grave de ce fumier lâcher un "Rideau" goguenard à mon intention. Cri de rage, puis je me souvins avoir fuit... Pourquoi avais-je fui ? Ce n'était pas dans mon caractère, bien au contraire, mais je crois que j'ai voulu m'éloigner le plus rapidement possible de la seule chose à laquelle je m'étais vraiment attaché. J'avais fuit, courant dans les ruelles sombres, loin de ce petit théâtre, de la planque que j'avais utilisé des années, de cette ville. Pas un vrai bagage. Pas une arme si ce n'est un vieux couteau. Pas une larme. Jamais je n'avais pleuré. J'aurais pu en cet instant, mais j'étais au delà...

Ouai, je crois bien que c'est là qu'j'ai vrillé.